Tuesday 13 February 2018

Vingt leçons de tango : Deuxième partie : L’étreinte est tout

L'abrazo devrait inclure tous les éléments d'un bon câlin, y compris la sincérité.

Traduit par François Camus
Lire le texte original en anglais ici

En 2017 j'ai souligné mes 20 ans en tango en écrivant une série de 20 articles, ou leçons que j’ai apprises dans, à travers, ou au sujet de cette danse complexe, élégante et passionnée. Voici ma deuxième « leçon ».

Leçon No. 2 : L’étreinte est tout. La première chose qu’on ressent quand on se rencontre sur la piste de danse pour une tanda, c’est l’étreinte ou l’abrazo. Dès ces premiers instants où l’on enlace et qu’on se fait enlacer par un/e partenaire, on découvre beaucoup de choses au sujet de cette personne en tant que danseur (et aussi comme personne, mais c’est un sujet pour un autre article) : s’il ou elle est confiant ou anxieux, contrôlant ou attentionné, intense ou réservé, concentré sur les pas ou sur la connexion. On peut ressentir le niveau d’habileté globale de notre partenaire, dès ces premiers instants fugaces, avant même de faire le premier pas.

L’étreinte au tango est essentiellement synonyme de connexion, et l’on sait déjà que le tango est une question de bonne connexion. C’est par l’intermédiaire de l’étreinte qu’on ressent tout, c’est elle qui nous permet de guider ou d’être guidé.

Évidemment, abrazo signifie littéralement faire un câlin ou serrer dans ses bras. Conséquemment, notre abrazo devrait inclure tous les éléments d’une bonne accolade : elle devrait envelopper notre partenaire, et le ou la tenir confortablement sans être imposante, restrictive ou autrement inconfortable, et elle devrait toujours être ressentie comme sincère.

Si l’étreinte est inadéquate – qu’elle tire, pousse, ou restreint, qu’elle est exagérément tendue ou trop relâchée – peu importe le nombre de belles figures ou d’embellissements complexes que vous exécuterez, ça ne donnera pas de sensations agréables à votre partenaire. Par contre, si votre étreinte est bonne, vous n’aurez pas à faire beaucoup pour que ce soit un plaisir de danser avec vous.

Au plan technique, voici comment j’utilise ma propre étreinte et ce que je dis à mes étudiants : utilisez davantage vos mains et moins vos bras. Vos bras doivent être souples et légers et vos articulations – poignets, coudes, épaules et omoplates – doivent conserver leur mobilité. Mais vos mains, particulièrement la paume de vos mains, devraient être actives, tenant votre partenaire de façon à bien le ou la ressentir, tenant au-delà de la surface des vêtements ou même de la peau, épousant la forme de la partie du corps avec laquelle elle est en contact. Le dos doit aussi être actif. Les muscles de la partie supérieure du dos devraient faire descendre vos épaules et vos omoplates, permettant à vos bras d’être détendus sans être mous. Cette technique vous permettra aussi d’avoir une étreinte adaptable. Le tango est beaucoup une question d’adaptabilité, et notre étreinte doit s’adapter à chaque partenaire et à chaque mouvement. Si nos bras sont souples et nos articulations mobiles dès le départ, l’étreinte s’adaptera d’elle-même sans effort. Finalement, mettez la même énergie dans les deux mains. Ceci n’est pas nécessairement facile à faire à cause de la nature asymétrique de l’étreinte du tango, mais l’équilibrage des deux mains peut être une solution miracle à trop de tirage ou de poussée de part et d’autre.

Plusieurs enseignants disent, et je le disais aussi : « Gardez votre cadre ». Je ne le dis plus parce que je crois que ce n’est pas bien interprété. Premièrement, dans un effort pour maintenir le cadre on a tendance à devenir trop rigide. Deuxièmement, la forme spécifique de l’étreinte a moins d’importance que son mode de fonctionnement. C’est pourquoi nous devrions pouvoir danser autant dans une étreinte de pratique, une étreinte fermée, une étreinte ouverte, ou même avec un seul bras ou sans les bras. Si on s’attarde trop à la forme exacte – l’angle des coudes, la hauteur des bras, la position exacte de la main dans le dos du partenaire – nous devenons trop centrés sur nous-mêmes et sur la forme, et en bout de ligne nous bloquons une partie des messages qu’on tente de transmettre ou de recevoir. Nous devrions plutôt tenir notre partenaire avec des mains fermes et des bras souples et légers, découvrant un juste équilibre entre ferme et souple, réceptif et communicatif, utilisant notre abrazo pour être avec notre partenaire et pour le ou la ressentir, pas pour nous tenir droit, contrôler, restreindre, tirer ou pousser. Ce que je peux dire à la place de « maintient ton cadre » c’est  « maintient le cadre de ton/ta partenaire ». Ainsi, vous utiliserez votre étreinte pour prendre soin de votre partenaire, lui permettre de bouger tout en lui donnant des points de référence stables et utiles, lesquels lui permettront de maintenir son axe et son équilibre tout en lui permettant de vous guider ou de vous suivre avec aisance… et, ce qui est le plus important, de se sentir bien.

L’étreinte pourrait bien être l’élément le plus important de notre danse.

Mais encore, la posture est aussi très importante.

Prochain article : Leçon No 3 : La posture est tout

Article précédent : Vingt leçons de tango: Première partie : Évolution

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